OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 I approve this message ! http://owni.fr/2010/11/03/i-approve-this-message/ http://owni.fr/2010/11/03/i-approve-this-message/#comments Wed, 03 Nov 2010 12:51:07 +0000 Ophelia Noor http://owni.fr/?p=34539 Alors que les élections de mi-mandat aux Etats-Unis s’achèvent sur une large victoire des Républicains à la chambre des représentants et que les démocrates conservent  leur majorité au Sénat il est intéressant de se pencher sur la guerre de l’image à laquelle se livrent les candidats, soutenus à coups de millions de dollars par les lobbies, les partis et les supporters des comités d’action politique.

Ces spots de campagnes publicitaires destinés au médium télévisuel et à classer pour certains au panthéon du LOL de la communication politique ne doivent pas nous détourner de la question du financement de ces campagnes de communication destinées aux électeurs.

2010, année du financement illimité

Ces spots de campagne sont pour la plupart financés par les Comité d’Action Politique (PAC – Political Action Committees) qui sont eux mêmes financés à travers  un système complexe de régulations des donations en fonction du statut  du PAC lui même (connecté ou non-connecté) et du donateur (individu, lobby, entreprise, syndicat…). Le PAC est surtout un intermédiaire entre la véritable source de l’argent et le candidat à l’élection.

Mais le 21 janvier 2010, l’arrêt de la Cour Suprême américaine Citizen United v FEC, achève de lever les dernières barrières rendant possible le financement illimité des campagnes de communication des candidats et donne naissance aux Super PAC, au grand dam des démocrates et du Président Obama qui avait qualifié le jugement de la Cour suprême de,

(…) major victory for big oil, Wall Street banks, health insurance companies and the other powerful interests that marshal their power every day in Washington to drown out the voices of everyday Americans

Ces dépenses de communication sont directement financées par les Super PAC. Ces derniers doivent déposer la liste de leurs donateurs auprès de l’autorité de régulation des élections (Federal Electoral Commission), bien qu’ils ne soient pas obligés de la divulguer avant le jour du vote. Ce qui rend plus difficile le travail de transparence mené par la même FEC ou des organismes indépendants comme la Sunlight Foundation.

Money, money, money !

Toute l’hypocrisie de cet arrêt tient au fait que si les contributions directes aux candidats sont toujours interdites, les corporations et les syndicats peuvent financer les campagnes publicitaires pour des montants illimités à travers ces supers comités d’action politique si ces derniers s’enregistrent en tant de “I.E-PAC” (Independent Expenditure) auprès de la FEC.

Rien de plus facile ! Il suffit d’en faire la demande par courrier… Et sans grande surprise, la FEC a été depuis submergée de lettres de demande d’enregistrement. La Sunlight Foundation Reporting Group s’est empressée de recenser au jour le jour ces demandes, dans une application consultable sur le site de leur enquête : Follow the Unlimited Money.

Citizen United a finalement permis à ces comités d’action politique de financer à la fois des spots de campagne en faveur d’un candidat mais aussi en opposition à son concurrent pour le même scrutin.  Et pour ajouter à la confusion, il sera nécessaire à l’électeur de distinguer les spots des équipes de campagne officielles et ceux de ces groupes extérieurs (outside groups) – qui par ailleurs peuvent les diffuser sans l’accord du candidat…

De cet imbroglio financier, politique et électoral, la rédaction d’Owni en a sorti une sélection lol des clips de campagne les plus marquants, de la sorcière au mouton démoniaque. Nous avons également réaliser pour RFI une application interactive permettant de visualiser les dépenses des candidats par état et partis : http://www.rfi.fr/ameriques/20101029-depenses-campagne-candidats-americains

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Tendance artillerie lourde

Pamela Gorman (Arizona) dans un spot 100 % NRA (National Rifle Association) se lâche :“Je suis une chrétienne conservatrice et une bonne tireuse”. Son but ? “Rendre chèvre la gauche” en quelques rafales à l’arme automatique !

Tendance Data

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Tendance mouton démoniaque

Un grand moment cinématographique, effet Koulechov et frissons garantis. C’est le favori de la rédaction.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Tendance Série télé

Dans la course au Sénat du Colorado, mention spéciale à la série Maison des horreurs (House of Horrors) montée contre le sénateur Ken Buck et en faveur du concurrent démocrate Michael Bennet. Le Colorado est l’état qui a bénéficié des dépenses les plus importantes des Comités d’Action Politiques (PAC) pour un total de $32,779,082.89

Tendance patriotes…professionnels !


Joe Miller, Alaska, candidat du Tea Party. “Cette élection c’est l’establishment contre nous ! Les politiciens professionnels pensent qu’ils sont de droit, qualifié pour prendre le pouvoir. Il est temps de leur montrer que c’est faux ! Votez pour un patriote professionnel !

Dale Peterson, Alabama : “J’ai été fermier, entrepreneur, flic et marine pendant la guerre du Vietnam, alors écoute !” Dale continue sont speech sur les racailles et les criminels, sa Winchester en bandoulière : “Nous les républicains valont mieux que ça !”

Tendance sorcellerie

Christine O’Donnell nous rassure : elle n’est pas une sorcière…elle est comme nous… ?!

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Tendance Do It Yourself

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A voir aussi en DIY:

Le gouverneur Hakeem dans le Dakota Nord,

Doug Aden dans le Colorado

Tendance Soap Opera

Blanche Lincoln, dans l’Arkansas, vous demande de garder foi en elle malgré les discours des experts. Petite musique mièvre et vent dans les cheveux dans un décor champêtre…

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crédits Flickr CC programwitch

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Opendata: de la marge à la norme http://owni.fr/2010/10/05/opendata-de-la-marge-a-la-norme/ http://owni.fr/2010/10/05/opendata-de-la-marge-a-la-norme/#comments Tue, 05 Oct 2010 16:05:29 +0000 Nicolas Kayser-Bril http://owni.fr/?p=30422 En politique, la mode était à la transparence et à l’ouverture à la fin des années 2000. Chaque candidat, dans une bonne partie des pays, a brandit les idéaux de responsabilisation et d’évaluation dans son programme.

Mais la mode change, en politique comme ailleurs, et nous devons maintenant faire en sorte que l’ouverture des données devienne la norme plutôt qu’une passade. Les intervenants du Personal Democracy Forum de Barcelone ont évoqué quelques pistes en ce sens.

Rentrer dans les têtes

John Wonderlich, directeur à la Sunlight Foundation, a mené le combat pour l’opendata aux Etats-Unis avec le succès que l’on sait, puisque l’administration Obama a mis en place – et alimente – le site data.gov. Depuis 2006, il met les administrations locales et fédérales sous pression pour qu’elles libèrent leurs données. Pourtant, aujourd’hui, il fait face à un ‘reality check’. C’est le moment où l’on va voir si l’ouverture des données à pénétré les mentalités.

Il explique comment, en préparation des élections de mi-mandat cette année, ses alliés de 2006 trainent des pieds pour libérer leurs données, maintenant qu’ils sont devenus des candidats sortants. Ils prennent peur et inventent des excuses pour ne pas que l’on puisse juger leur action à l’aune des données publiques.

La semaine dernière par exemple, un comité du Congrès lui a dit qu’ils ne pouvaient pas stocker de données sur plus de trois ans, alors qu’il ne s’agit que de quelques giga octets en plus. Soit un investissement d’une centaine de dollars, pour une institution disposant d’un budget de plusieurs milliards !

Cette mauvaise foi, qui ne surprendra pas un Européen, parait déplacée aux Etats-Unis. Là bas, toujours selon John, le principal problème auquel le mouvement opendata a du faire face a été de convaincre les politiciens de s’engager pour publier des documents en sachant qu’ils n’auront pas de couverture médiatique. Ca parait bien peu quand on sait qu’en Europe, le conseiller de la commissaire chargée de la société numérique ne connait même pas les textes régissant l’ouverture des données dans sa propre organisation!

Mettre les journalistes de notre côté

Si les politiciens sont et resteront une cause perdue, le mouvement opendata doit trouver d’autres relais au sein de la société civile pour diffuser leur message et lui faire prendre racine. Une partie des ressources de la Sunlight Foundation sont ainsi dirigées vers une équipe de journalistes d’investigation chargés d’extraire les informations les plus intéressantes des documents publics.

Surtout, la Sunlight Foundation offre des formations à l’utilisation de données pour journalistes. Selon John, après ce cours, les journalistes rentrent chez eux et envoient plein de requêtes à leurs administrations locales pour obtenir des informations publiques, l’équivalent chez nous de requêtes CADA.

L’importance des journalistes a été également évoquée par Marko Rakar, un Croate conseiller politique le jour et blogueur politique la nuit. Il raconte son combat pour obtenir le budget de l’Etat, « le plus important document d’un pays, » selon lui. Le gouvernement croate s’est toujours refusé à communiquer les chiffres au format tableur. En effet, le gouvernement doit fournir au Parlement croate une et unique version de la proposition de budget. Le document officiel est imprimé avant d’être transmis. Pour Zagreb, seul ce document de référence – imprimé – peut être transmis aux journalistes, tous les autres n’étant que des versions de travail susceptibles de contenir des erreurs. Libre ensuite à qui veut de parcourir les 14 000 lignes budgétaires sur papier.

Marko ne s’est pas laissé démonter et s’est “procuré” une version Excel du budget. Son analyse a révélé plusieurs histoires juteuses, concernant notamment le parc automobile présidentiel et les salaires des fonctionnaires. Les médias se sont alors emparés de l’affaire, qui a, selon lui, été reprise par plus de 40 titres, y compris le journal télévisé du soir.

Convaincre la population

Le 4e pouvoir reste le soutien le plus évident de l’opendata, les données publiques contenant de nombreux sujets d’articles. Mais on sait bien que la presse périclite et que les journalistes n’ont pas tous les compétences nécessaires à l’analyse de données, quand ils ne sont pas tout simplement de mèche avec les administrations locales.

Pour pérenniser le mouvement de l’opendata, il faut que chaque citoyen considère comme normal le droit d’accès aux documents administratifs. Que chaque fonctionnaire trouve normal qu’on puisse lui demander le montant de son salaire. Que les ministres ne soient pas offusqués lorsqu’on publie le prix de leur hôtel.

Sur ce dernier point, suite à un sondage exclusif et très peu scientifique, je suis en mesure d’affirmer que les Européens ne sont pas en retard. Alec Ross, conseiller d’Hillary Clinton, a jugé “normal” que les contribuables américains connaissent le montant de ses notes de frais, mais n’en a pas dit plus. Constantijn van Oranje-Nassau, de la Commission Européenne, a, lui, admis ne pas connaitre le prix de sa chambre au Novotel, mais a affirmer payer les taxis de sa poche.

Au-delà des ministres, force est de constater que les citoyens Européens ne connaissent que très peu la législation sur l’ouverture des données. Helen Darbishire, directrice de l’ONG Access Info, raconte qu’elle avait monté un stand, carrefour de l’Odéon à Paris, et distribué des flyers aux passants sur la loi du 17 juillet 1978. Pas un ne connaissait le texte !

L’apathie des citoyens et des contribuables reste le problème numéro un. Sans soutien populaire, les avancées effectuées sur l’opendata ne se concrétiseront jamais. Alvaro Ortiz, l’un des pionniers du mouvement en Espagne, le dit sans détour. Le sujet était attirant avant la crise, explique-t-il, mais la montée du chômage l’a relégué en bas de la liste des promesses politiques.

Dejan Milovac, qui dirige une ONG luttant contre la corruption au Monténégro, explique comment il a trouvé un soutien populaire pour combattre un projet de construction illégale sur le littoral. Un consortium russe a commencé à construire un projet de 200m€, sans bien sûr attendre l’approbation du permis de construire – le parrain local couvrait l’affaire.

Il a montré quels étaient les réseaux de pouvoir à l’œuvre dans l’affaire, et comment l’argent public était détourné ou les taxes impayées. Pour lui, il est fondamental de faire comprendre aux citoyens qu’il existe bien une différence entre 1m€ et 3m€, par exemple, en expliquant ce qui peut être fait avec l’argent manquant. La mobilisation a été telle que Dejan a obtenu que les permis de construire soient désormais disponibles en ligne, afin que chacun puisse vérifier la légalité des projets de construction.

Crédits image CC FlickR par opensourceway

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Transparence : les dangers de l’ivresse idéologique http://owni.fr/2009/10/13/transparence-les-dangers-de-livresse-ideologique/ http://owni.fr/2009/10/13/transparence-les-dangers-de-livresse-ideologique/#comments Tue, 13 Oct 2009 17:51:14 +0000 Thierry Lhôte http://owni.fr/?p=4579 Modernity, Mirrored and Reflected Infinitely - Josiah McElheny, 2003

Modernity, Mirrored and Reflected Infinitely - Josiah McElheny, 2003

Dans un essai publié vendredi dernier, Lawrence Lessig, prend ses distances avec le mouvement pour la Transparence et le Gouvernement 2.0, tel qu’il semble prendre le chemin, aujourd’hui.
« Like the decision to go to war in Iraq, transparency has become an unquestionable bipartisan value. »
« Comme la décision de faire la guerre à l’Irak, la Transparence est devenue une valeur bipartite qui ne supporte pas la contestation. »

De la part d’un juriste, les termes employés ne sont jamais innocents, et signale de la part de l’administration, du corps politique, ainsi que des associations de soutien à ce mouvement telles que la Sunlight Foundation, un aveuglement dangereux.

La nature idéologique de ce mouvement est caractérisée aussi par l’absence de critique dans sa pensée opérationnelle, car si la Transparence est prise au sens de Transparence nue, c’est à dire d’une transparence qui n’est pas accompagnée d’une réflexion politique orientant les résultats, alors dans la recherche du bien souhaité par l’exposition des données institutionnelles au travers des technologies de l’information, des catastrophes collatérales seront inévitablement déclenchées.
Autrement dit, la Transparence risque d’être la corde avec laquelle le système démocratique risque de se pendre.

Attention, il ne s’agit pas de la part de Lawrence Lessig d’un discours radical ; la radicalité est d’abord dans le messianisme orchestré dans la société autour de cette transparence et dont les média produisent le reflet optimal ; mais pas seulement, il y a aussi la radicalité des outils technologiques employés, en l’occurrence le réseau.
Lessig constate qu’à chaque libération d’une activité humaine sur le réseau Internet, il n’y a jamais eu de retour en arrière possible à l’état précédent. Une partie du contrôle sur cette activité est alors définitivement abandonné. Ce fut vrai pour les industries de la presse et de la musique, qui, même par refus de s’engager ne firent que retarder leur transformation forcée, au risque de leur disparition.

Et c’est l’analogie principale exposée, il n’existe que deux chemins possibles maintenant : soit les acteurs actuels du changement (corps administratif, politique, associatif) accompagnent intelligemment le mouvement de Transparence, soit ils continuent comme aujourd’hui à faire confiance dans la Transparence nue et le système démocratique se retrouvera dans le meilleur des cas obligé de subir des transformations brutales imprévues, au risque même, s’il refuse de se plier à cette violence, de sombrer.

Si l’on ne prend pas en compte les limites comportementales humaines en jeu permanent avec le réseau, et que l’on décide d’ouvrir les données parlementaires et gouvernementales uniquement parce que l’on croit absolument que l’ouverture est bonne en elle-même, au lieu d’atteindre l’objectif d’une surveillance citoyenne appropriée et souhaitée, on établira des machines à créer de l’incompréhension, puis des mécaniques de ressentiment incontrôlables au sein de la société.

“La lumière du soleil (sunlight) est le meilleur des désinfectants”, telle est la devise que la Sunlight Foundation a empruntée à Louis Brandeis, et qui fait référence à l’effort de transparence pour « laisser passer les rayons du soleil » qui détruiraient définitivement la corruption au sein des organisations (messianisme américain typique), Lawrence Lessig note qu’il suffit de s’être aventuré dans un marécage pour constater que la lumière du soleil peut avoir une autre effet que celui d’un désinfectant.

Lire l’article sur le blog originel

photo par mon ami loranger – MoMA, New York, janvier 2005

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La Transparence ou le “Coca Light” technologique http://owni.fr/2009/10/13/la-transparence-ou-le-coca-light-technologique/ http://owni.fr/2009/10/13/la-transparence-ou-le-coca-light-technologique/#comments Tue, 13 Oct 2009 14:08:35 +0000 Thierry Lhôte http://owni.fr/?p=4643

Tim Wu

Tim Wu

Le débat continue, à la suite de l’essai de Lawrence Lessig, sur le site du magazine The New Republic. Rappelons que Lessig en tant que juriste de renom, après s’être occupé de droit d’auteur, se concentre récemment sur la montée exponentielle des investissements du lobbying au Congrès américain, qui, d’après lui, s’est récemment transformé en véritable mécanisme de corruption officielle.

On a cru Lessig attaché à la croisade de la Sunlight Foundation et de sa co-fondatrice Ellen Miller, mais cela ne semble plus le cas, puisqu’il met en garde sur les modalités d’application et le zèle de ce mouvement pour la transparence (rendre public par le Web les données parlementaires et gouvernementales), qui risquent, si ce dernier n’est pas mieux pensé et accompagné, de transformer la démocratie en véritable champ de bataille, dressant les citoyens contre les élus et inversement.

Tim Wu, lui, pense que Lessig n’est pas allé assez loin, et qu’il a manqué le point essentiel de ce que l’on pouvait opposer au mouvement pour la Transparence et du Gouvernement 2.0.

Il signe un brillant article, empreint de pensée classique d’origine chinoise et sans complexe. S’inspirer de la tradition est toujours un pas majeur pour un technophile, car on aboutit généralement à un regard qui englobe l’humanité, plutôt qu’à une forme de reporting des sciences humaines qui souvent se noie dans un verre d’eau conceptuel.
Une vision que l’on rencontre rarement, mais qui n’est pas sotte, que la technologie n’est pas là pour remplacer la décision, qu’elle ne le peut pas. On rejoint un peu la pensée de Robert Kahn, l’architecte de l’Internet, lorsqu’il affirme qu’en matière de design de réseau les décisions importantes se partagent à 10% pour la technologie et le reste concerne la politique.
Pour se placer définitivement parmi les hérétiques, on pourrait ajouter que ni les difficultés, ni les joies de l’être humain sont effacées par la pratique de l’Internet, mais que la vie réelle est toujours là en profondeur, et que le tragique ou la comédie de l’existence n’ont en aucun cas disparu et surtout pas dans la récente croute artificielle et mobile que l’on appelle Web social.

Tim Wu commence par qualifier de mythe de la civilisation américaine, que des contraintes externes imposées sur les pratiques politiciennes produiraient nécessairement du bon gouvernement. Que le politique serait à envisager comme une forme de chimie ou d’ingénierie, qu’il suffirait d’appliquer telle ou telle action extérieure sur une subtile mécanique pour en corriger des dysfonctionnements.
De fait, en ne manquant pas de citer Lao Tseu au passage, il constate exactement l’inverse : l’exercice d’une pression morale extérieure ne fait que produire un alibi de bon comportement ou une sorte de validation positive automatique de l’action du parlementaire ou du ministre, qui, en se conformant à ces procédures peut continuer d’exercer comme bon lui semble à l’abri de ce paravent.
Trop de transparence renforcerait la ruse initiale des acteurs, signe alors l’échec de ce qui est recherché par la Transparence, puisque les politiques finiront par s’esquiver derrière cette transparence pour ne pas avoir à rendre compte d’autre vertu que celle d’obéir et de se conformer à ce cadre exigé et mise en place par la société civile.
Cela encourage même au bout du compte à une forme de déresponsabilisation. L’apparence d’un passeport en règle n’a en effet jamais permis de détecter un terroriste

A l’évidence, être ou paraître conforme aux attentes du public est un point qui entretient certainement une confiance réciproque, mais en aucun cas ne permet de s’assurer de la compétence de l’élu, ni de sa vertu, ni de sa volonté d’améliorer le destin de ses électeurs, qualités qui appartiennent à la personne mais pas aux règlements et modèles comportementaux qu’on lui impose de l’extérieur.
Une analogie amusante est celle de la mode des années 80 du Coca Light (Diet Coke) ou des produits sans graisses (low or fat free) dans l’industrie alimentaire américaine, qui répondaient à un besoin puis à une ordonnance du public, mais en fait n’a pu que déplacer les problèmes de santé des personnes sans pour autant transformer l’américain moyen en homme mince et élégant.
La Transparence serait en fait le Coca Light politico-technologique d’aujourd’hui. Voici où en sont les illusions américaines, que de simples applications Web permettront de résoudre les habitudes de corruption entendues comme effets du lobbying intensif.
Tim Wu conclut assez justement que dans l’élection 2008, les américains ont choisi entre deux personnalités qui s’appuyaient sur le thème changement, et « qu’ils ont voté non pour des cures politiques à la mode, mais pour un type différent de leader.
En fin de compte, c’est peut-être la seule réforme qui fera une différence. C’est un changement, non sur ce que l’on connaît des personnes qui sont en charge du pouvoir, mais plutôt sur qui elles sont. »

Bien joué, Tim.

Photographie – Tim Wu – Wikimedia commons

Lire l’article sur le blog originel

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